entendre transpirer à chaque morceau toute les musiques dont elle s'est nourrie. Je me demande ce que sa musique sera quand elle aura complètement digéré le tout- Quelque chose de bien, à n'en pas douter
Plutôt vachement d'accord.
Sur
Hello Maker, il y a même une impression d'entendre du Simon & Garfunkel, et très franchement je m'attendais pas à pouvoir penser ça d'un album à résonnance plutôt R'n'B (encore que je ne le trouve enfermé dans aucune case bien spécifique, un peu à la manière des meilleurs albums de Kelis).
Encore un peu de mal avec l'album dans sa plus stricte globalité aussi, mais je veux lui laisser sa chance, il y a vraiment quelque chose.
Et puisqu'on parle de
Tightrope, avec en featuring Big Boi d'OutKast, ça tourne pas mal chez moi :
Big Boi -
Sir Lucious Left Foot: The Son of Chico Dusty.
Je ne connais pas encore assez OutKast pour pouvoir réellement me prononcer quant à l'exercice osé par Big Boi sans son alter égo "beau gosse" André 3000, mais en ayant en tête
Stankonia et ses sonorités dirty south bien nerveuses, il faut reconnaître que l'essai est sacrément... Jouissif.
Je n'ai jamais été un grand fan de Dirty South : souvent par des exemples tenant à la limite du cliché (des copains de Lil' Jon ou encore les moins bons moments d'un Lil Wayne qui en définitive, a bien plus de potentiel qu'il semble vouloir le montrer), cette vulgarité dans les beats, ses gros claviers trance et ses claps intempestifs, ça n'a jamais été pour moi, d'autant que les flows accompagnant ses beats étaient les 3/4 du temps à la limite du minable.
Big Boi n'a pourtant jamais eu la prétention, avec ou sans OutKast de faire autre chose que du Dirty South : c'est avec ce style qu'ils ont commencé, qu'ils ont persévéré, qu'ils se sont fait connaître et ce malgré un don intestable pour l'expérimentation qui leur a permis de donner au genre ses lettres de noblesse. On ne devrait donc pas s'étonner d'avoir affaire à un album pur dirty south ici...
... Et pourtant, à peine la courte intro terminée, un gros clap dans la gueule, quelques scratches, des claviers pimp à mort, on se dit "merde, on nous aurait menti ? Qu'est-ce qui a pris à ce poids lourd du Hip Hop US de péter une pareille durite ?", puis le refrain arrive, et on se rend compte qu'en fait le bonhomme a un flow proprement
intestable, c'est musical, ça crache, ça sent les aisselles moites à force d'avoir les mains en l'air au rythme des meilleurs couplets du bonhomme.
Daddy Fat Sax que ça s'appelle. "Fat", c'est ça le terme qu'on cherchait, toujours subtil, jamais facile, mais surtout qu'est ce qu'on se MARRE quoi. Big Boi a vraiment mis les petits plats dans les grands dès le premier titre et ça se calme pratiquement jamais sur la suite de l'album : les claviers sont là (l'excellent
Shine Blockas), les bons featurings aussi (d'ailleurs le morceau avec Janelle Monae,
Be Still, est bien sympa lui aussi), des fois c'est un peu vu et revu ce qui n'empêche pas de prendre un pied monstre (
General Patton samplant La Grande Marche d'
Aida de Verdi pour un freestyle des plus impériaux) sans délaisser encore une fois la petite partie expérimentale si chère à OutKast, qui donne lieu à quelques riffs de folie sans que le résultat ne lorgne dans le rock de façon résolue (
Tangerine, le single
Shutterbugg).
Alors au final même si certains titres sont de trop, ce premier opus de Big Boi se révèle toutefois être un exercice de style complet et à la hauteur de ce qu'on est légitimement en droit d'attendre d'un membre d'Outkast : il ne trahit pas la mythologie qu'il a soigneusement mis en place et enrichi avec son compère, et lui offre l'opportunité exclusive de se lâcher complètement, pour un album hétéroclite, soigné, un peu plus pimp qu'à l'ordinaire mais jamais dans le mauvais sens du terme. On s'amuse franchement, sans avoir honte, et bien au contraire : devant une rigolade aussi ingénieuse, et malgré ses facilités, on aurait même tendance à en redemander. Très bonne surprise !