Dans la série des mini-albums exclusivement réservés au marché japonais que Radiohead publie depuis 1998 et l'excellent No Surprises / Running from Demons, la voix du quintet d'Oxford publie aujourd'hui Spitting Feathers, la face cachée de son album solo The Eraser, plus radicalement electro, trouble, mécanique et déréglée.
A Rat’s Nest est un morceau en sable (é)mouvant où Thom Yorke batît sur de l’impalpable une ligne de chant grave, dentelée et mystique comme l’ouverture d’un psaume. Séquences en courants contraires, basses et claviers coulés dans du béton armé et voix gémellaire, aussi séduisante qu’inquiétante, tout concourt à ce que Yorke prenne à revers les nostalgiques d’un lyrisme immaculé et les frileux qui, depuis Kid A, écoutent Radiohead avec un cache-oreilles, redoutant le climat electro polaire.
Sur The Drunkk Machine Thom greffe à sa voix des sons dérivés du triumvirat Squarepusher/Kid 606/Autechre. Restent Jetstream, comptine electronica aux voix fractionnées et haletantes, sur laquelle seul un mille-pattes pourrait danser et Iluvya – message crypté à décomposer en I love You –, un trafic radio surabondant de beats hip hop à la Dizzee Rascal, comme passés dans l’accélérateur de particules de Jonny Greenwood. En bonus, une version longue et reformatée du single Harrowdown Hill et sa vidéo qui ouvre le champ au paysage mental de Yorke et à ses phobies environnementales.
Chronique Inrocks